LYCEE 4.0 : Une mise en place non concertée, mal pensée et trop rapide !

Enquête sur le lycée 4.0 : Il faut prendre en compte les demandes des enseignants avant de généraliser le dispositif à toute la Région.

L’introduction trop rapide du dispositif « Lycée 4.0 », sans préparation, sans consultation préalable des équipes concernées et sans adaptation technique des établissements, a des conséquences négatives quant aux conditions de travail des équipes. C’est la triste conclusion de l’enquête du Le CHSCT du Haut-Rhin (Comité Hygiène Sécurité Conditions de Travail) effectuée auprès des professeurs des lycées expérimentateurs depuis la rentrée 2017. Le questionnaire et l’exploitation des 151 réponses ont été réalisés par les syndicats de l’enseignement qui siègent dans ce comité : La FSU, le SGEN et le SE-UNSA.

Il semble indispensable, pour le SE-UNSA, avant d’envisager une généralisation du dispositif à tous les lycées de la Région, que soient prises en compte les remarques et demandes des professeurs. Dans la même logique, le SE Unsa demande à ce que la liberté pédagogique des enseignants soit préservée et qu’ils restent libres d’utiliser ou non avec leurs élèves au gré de leurs besoins, ces outils qui finalement leur ont été imposés.

Le thème le plus important qui ressort de l’enquête est celui de la santé et du bien-être des élèves et des équipes éducatives.

  • Se pose d’abord  la question du temps d’exposition souhaitable aux écrans. Un élève de seconde par exemple doit-il passer 26h par semaine, au lycée, devant un écran ? Faut-il envisager un temps maximum d’exposition et donc n’utiliser ordinateur et manuel numérique que pour une partie des activités ? Quelle réponse pouvons-nous apporter aux élèves qui se plaignent de fatigue oculaire ?
  • De même, le SE-UNSA après lecture des résultats de l’enquête souhaite une réflexion sur le type de connexion à proposer et sa conséquence quant à l’exposition des élèves et des personnels aux ondes électromagnétiques.Les lycées choisissent en général une connexion Wi-Fi. La connexion filaire serait plus efficace et éviterait tout risque d’une éventuelle surexposition aux ondes. Quelle réponse apporter à un élève ou à un personnel souffrant d’électro -sensibilité ?

Second thème : les nombreux problèmes liés aux installations existantes

Le SE-UNSA demande que les problèmes matériels, très nombreux dans les lycées expérimentateurs, soient traités avant la généralisation du dispositif. Un audit des installations techniques dans chaque lycée est indispensable.

  • Le nombre de prises électriques doit être suffisant afin que les élèves, dans chaque salle de cours où le manuel numérique est utilisé, puissent recharger les ordinateurs. Dans les lycées expérimentateurs ce n’est pas le cas, de nombreux ordinateurs portables, même chargé la veille se retrouvent sans batterie et sans prise pour la recharge en milieu de journée.
  • Ajoutons que pour travailler confortablement l’élève a besoin de place. En effet il doit pouvoir poser en même temps sur sa table son ordinateur portable, son cahier et une trousse. Dans de nombreuses salles des lycées expérimentateurs ce n’est actuellement pas possible.
  • Un problème mis en avant par l’enquête est celui de la qualité de la connexion. Souvent la bande passante, par le Wifi est insuffisante. Les pages des manuels mettent beaucoup trop de temps à être chargées. Pour le SE-UNSA il est indispensable d’avoir des connexions par wifi ou filaires de qualité. Les élèves ne doivent pas perdre des dizaines de minutes chaque semaine pour accéder aux manuels et autres ressources numériques.

Dernier thème : l’impact sur la qualité des apprentissages scolaires.

Une réflexion globale sur la plus-value pédagogique apportée par le numérique et le manuel numérique est demandée par le SE-UNSA.

  • Quel est l’intérêt pédagogique du manuel dématérialisé ? Est-il adapté à tous les enseignants et à tous les enseignements ? Le professeur de Français par exemple souhaite en général que les élèves puissent lire des extraits longs d’œuvres classiques dans le manuel papier. Le professeur d’Histoire Géographie apprécie le manuel papier pour pourvoir travailler sur plusieurs documents en même temps. Sur l’ordinateur l’élève voit les documents les uns après les autres.
  • Ce sont les enseignants qui doivent choisir les manuels papiers ou numériques qui leur semblent être les meilleurs supports pédagogiques parmi les offres existantes. Le SE-UNSA demande que cette liberté de choix pédagogique des enseignants soit respectée.
  • Un audit du coût du passage au numérique serait bienvenu. Les manuels papiers peuvent être utilisés durant de nombreuses années alors que les licences des manuels numériques doivent souvent être achetées chaque année. Il faut que les enseignants puissent faire le choix du manuel numérique en toute connaissance de cause.
  • Le manuel numérique est-il téléchargeable ou doit-il obligatoirement être consulté en ligne, avec les problèmes de connexion que cela peut impliquer ?
  • Certains manuels numériques sont interactifs, les élèves peuvent y écrire, faire des exercices, voire y trouver de la remédiation… D’autres non. S’il s’agit simplement de manuels qui sont une version pdf du manuel papier, autant utiliser le manuel papier !
  • Les décideurs ne se sont pas préoccupés des vraies attentes en outils numériques qui diffèrent selon les disciplines (logiciels, applications etc…), outils qui peuvent présenter un réel intérêt dans certaines matières où la simple version numérique d’un manuel papier fait pâle figure … Une réflexion et une formation sur l’utilisation du numérique pour chaque discipline aurait dû être le préalable à toute décision et doit maintenant accompagner un projet qui ne peut rester en l’état .

Qui va s’occuper de quoi ?

Pour le SE-Unsa, Il faut aujourd’hui un personnel référent permanent bien formé dans chaque lycée , ayant du temps pour accompagner ses collègues et à même de les former à son tour.

La gestion des manuels et autres futurs outils numériques implique une surcharge de travail importante. Il est inenvisageable de confier cette responsabilité aux seuls professeurs documentalistes, sans formation préalable et sans avoir fixé avec eux une nouvelle répartition des tâches et de nouvelles conditions d’exercice de leur métier. Qui sera responsable des outils numériques ? L’élève, chaque enseignant, le professeur documentaliste, le gestionnaire, le chef d’établissement, la région ? Tout cela mérite d’être éclairci rapidement !

Enfin, alors que la région engloutit dans ce projet plus de 72 millions d’euros, le SE – Unsa déplore qu’elle ait refusé (assez mesquinement) d’équiper les enseignants en matériel alors que leurs élèves le seront…

Pour le SE-UNSA, le passage et le rythme de passage au numérique ne peuvent être imposés.  Cela doit pouvoir être progressif et répondre aux demandes des enseignants, des coordonnateurs de discipline et du Conseil d’Administration. Le Lycée 4.0. trop vite imposé,  entraîne, comme le montre l’enquête, une surcharge des tâches et une dégradation des conditions de travail pour les enseignants, sans toujours garantir une plus  value pédagogique à ce stade. Le SE-Unsa plaide pour un lycée où l’utilisation du numérique serait facilitée, concertée et accompagnée, bien loin du choix dogmatique imposé aujourd’hui par la région sans concertation des acteurs.

Denis KEIGLER Secrétaire second degré Haut-Rhin seunsa68.2nd.degre@gmail.com

André GEHEN Secrétaire de la Section Haut-Rhin 68@se-unsa.org 

David GRISINELLI, Secrétaire académique   ac-strasbourg@se-unsa.org