Téléphones à l’école et au collège : l’interdiction qui en fait… autorise !

 Au commencement, les téléphones étaient interdits…
Depuis 2010 l’article L511-5 du Code de l’éducation interdisait en ces termes l’utilisation des téléphones mobiles par les élèves dans les écoles et les collèges :
«Dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l’utilisation durant toute activité d’enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d’un téléphone mobile est interdite
Ce texte était issu de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement. Son intention était une mise en oeuvre du principe de précaution pour protéger les enfants d’une éventuelle exposition néfaste aux ondes. Depuis il y a eu consensus scientifique sur la question même si certains s’inquiètent toujours. Par ailleurs, un téléphone silencieux mais non éteint dans la poche ou au fond d’un cartable d’un élève émet autant d’ondes que s’il était posé sur sa table prêt à servir.

En 2010 les smartphones n’étaient pas encore massivement arrivés dans les collèges et cette interdiction d’utilisation «pendant les activités d’enseignement», rendant donc tout usage pédagogique hors la loi, ne gênait personne. Et puis, les ordiphones (les smartphones sont bien des mini-ordinateurs) se sont imposés et il est devenu difficile, voire contre-productif, de respecter cet article de loi à la lettre.

En effet comment interdire le fait qu’un élève puisse prendre en photo le tableau où figure le cours qu’il n’a pas fini de recopier, la possibilité de mettre un rappel pour penser à faire signer son autorisation pour la sortie culturelle ou la recherche d’une information sur Wikipedia ? Si cela est fait avec l’accord de l’enseignant et dans l’intérêt évident de l’élève, ce n’est pas raisonnable de l’interdire.
Si on prend le texte à la lettre, le règlement intérieur de l’établissement pouvait interdire -ou en creux autoriser donc – des lieux où l’usage des téléphones par les élèves était possible mais hors temps d’enseignement. Beaucoup de collèges ont néanmoins autorisé les usages pédagogiques et des cellules juridiques académiques, sachant le texte inadapté, ont validé sans souci ces RI pourtant contraires au texte du Code de l’éducation.
Et maintenant ?
Et bien les usages pédagogiques sont exclus de l’interdiction… et ça, ça change vraiment la donne !
Le nouveau texte qui a été voté le 7 juin 2018 dans le cadre d’une procédure accélérée, est ainsi rédigé :
Art. L. 511-5. – «L’utilisation d’un téléphone mobile ou de tout autre équipement terminal de communications électroniques par un élève est, sauf pour des usages pédagogiques, interdite dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges et pendant toute activité liée à l’enseignement qui se déroule à l’extérieur de leur enceinte, à l’exception des lieux où, dans les conditions qu’il précise, le règlement intérieur l’autorise expressément.»
Il est donc clair ici que l’interdiction ne concerne pas les usages pédagogiques, qui sont donc possibles à tout moment et en tout lieu. Et ça c’est nouveau et très appréciable !
Dorénavant, tout enseignant qui juge pertinent un usage pédagogique du téléphone par les élèves pourra l’autoriser sans être en contradiction avec la loi… osera-t-on un merci Emmanuel Macron et Jean-Michel Blanquer pour cette évolution de bon sens ? On pourrait l’envisager si cette loi n’était pas vantée de façon démagogique comme étant une enfin vraie interdiction des téléphones à l’école et au collège !
Le SE-Unsa est satisfait néanmoins que chaque enseignant puisse maintenant en toute liberté autoriser, restreindre ou proscrire l’usage des téléphones par les élèves suivant les modalités pédagogiques qu’il aura choisies pour répondre au plus près aux besoins de ses élèves.