Article parue dans la revue Se-Unsa Second degré mai 2012
« La répartition injuste des moyens entre établissements aggrave les inégalités scolaires »
Au terme d’un an d’enquête, c’est la conclusion d’un rapport provisoire de la Cour des Comptes cité par Le Monde du 12 avril 2012. Ce rapport corrobore les résultats de l’enquête PISA 2009 qui pointait du doigt l’ « inégalité scolaire persistante » du système éducatif français. D’après cette enquête, les disparités sociales expliquent 17% des différences de résultats chez les élèves français alors que la moyenne des pays de l’OCDE est de 14%.
Un problème de méthode dans la répartition des moyens
Ces inégalités qui se renforcent tiennent largement à la méthode retenue par le ministère à l’heure de répartir les moyens aux académies: elle ne tient ni compte du nombre d’ élèves, ni de leur milieu social , ni de leurs résultats aux évaluations au moment d’octroyer les postes d’enseignants, tous chiffres connus et donc exploitables…Au lieu de se fonder sur ces critères objectifs en vue d’une distribution équitable, on applique une pure logique comptable, voire « au petit bonheur la chance »: plus une académie est grande, plus elle est ponctionnée en période de récupération des postes et plus son tour arrive tard dans le dialogue de gestion entre le ministère et les académies, moins il reste de postes de profs à distribuer.
Non, les ZEP ne sont pas favorisées!
Alors, NON, les ZEP ne sont pas favorisées, contrairement à ce que le Ministère voudrait faire croire: dans ses calculs, l’Etat met toujours en avant les primes et autres crédits pédagogiques octroyés aux ZEP, qu’il chiffre à 922 millions d’euros mais il omet, fort à propos, de prendre en compte le fait qu’on affecte dans les zones défavorisées les profs qui coûtent le moins cher, parce qu’ils sont les plus jeunes..Même ainsi le compte n’y est pas: la cour des Compte des Comptes mentionne qu’ en 2010 l’Etat a dépensé 47% de plus pour former un élève parisien que pour former un banlieusard de Créteil…
Le Se-UNSA s’insurge contre cette inégalité de traitement des territoires consistant à donner plus à ceux qui ont déjà beaucoup et à doter chichement ceux qui nécessiteraient un intérêt accru.
La situation des ZEP alsaciennes
Dans une éducation devenue si peu nationale, s’ajoute à cela que selon l’Académie où il se trouve, un établissement ZEP sera doté différemment. Rappelons ainsi que dans le Bas-Rhin, les ZEP strasbourgeoises ont vu leurs moyens horaires baisser de 4% entre 2010 et 2012 alors que les effectifs sont restés stables, en vertu d’un « principe de solidarité entre établissements » systématiquement avancé par le rectorat, principe des plus scandaleux puisqu’il annule la mission étatique d’assurer l’égalité des chances!
Les jeunes des quartiers populaires subissent ainsi une triple peine: un échec scolaire important, un taux de chômage deux fois supérieur à la moyenne, et désormais une inégalité de traitement des territoires qui s’assimilent à un abandon de l’Etat. On a envie de rajouter qu’en prime, ils sont les cobayes des expériences les plus hasardeuses de l’Etat quand il s’essaie, par exemple, à libéraliser l’éducation en créant des établissements ECLAIR sommés aujourd’hui de faire mieux, mais sans plus, sous peine de recevoir encore moins…
A qui la faute?
Le Se-UNSA pointe comme le fait la Cour des Comptes, l‘absence de pilotage national et de politique volontariste de la part des ministres successifs pour lutter contre les inégalités scolaires.
Il faut en finir avec les tentatives pour se donner bonne conscience ( les internats d’excellence pour sauver « quelques enfants pauvres » ) et autres « ripolinages » successifs: des ZEP, aux RAR et des RAR aux ECLAIRS (à moyens constants, sacré progrès!). Que ne va-t-on pas encore inventer comme mesurette médiatique, dont l’absence d’envergure et de rationalité permettra ensuite d’en justifier l’inefficacité?
Il est temps de refonder l’Education prioritaire et de remettre de l’ordre, de l’équité et de la justice dans l’organisation de notre Ecole!